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27 Jan

Jeudi 22 janvier 2015 : Tissage à Wend Kuni et rencontre avec la maison des jeunes de Sabou

Publié par Cécile André  - Catégories :  #Le voyage

Jeudi 22 janvier 2015 : Tissage à Wend Kuni et rencontre avec la maison des jeunes de SabouJeudi 22 janvier 2015 : Tissage à Wend Kuni et rencontre avec la maison des jeunes de Sabou

Ce matin, je laisse les bretonnes dormir et je me rends pour 9h à l'association Wend Kuni où Albert m'a donné rendez-vous. Il a le quart d'heure africain ;-) J'en profite pour regarder une jeune femme handicapée en train de faire du tissage. Elle a attrapé bébé la poliomyélite dans de l'eau non traitée (elle n'était probablement pas vaccinée). Tout est fait à la main à Wend Kuni : de l'enfilage, à la préparation de patron jusqu'au tissage. C'est très joli. Le matériel est adapté à leur handicap. Je trouve qu'ici la différence est largement acceptée et les personnes handicapées sont très bien intégrées à la vie sociale et professionnelle. Leurs réalisations sont valorisées. L'initiative de Wend Kuni est vraiment à mettre en avant. C'est un exemple d'intégration par le travail.

Plusieurs enfants m'observent. Je suis assise sur un banc, les jambes croisées et mon menton dans une main. Une petite fille se met à côté de moi et m'imite. Elle ne parle pas français. Elle voit que je l'ai remarqué. Elle se met alors à rire timidement. Je fais semblant de me gratter la tête. Elle reproduit. Je fais semblant de bailler. Tout pareil ! J'adore. C'est du pain béni pour moi de rentrer en relation avec des enfants par ce biais. Nous voilà à cinq ou six en train de faire avec nos mains le jeu des « trois p'tits chats » et des rythmes. Il y a une belle écoute dans le groupe. Je leur chante « 5 p'tits moutons qui couraient dans la neige. Tout blanc. Tout blanc le joli manège. 5 p'tits moutons qui couraient dans la neige. Il y en a un qui tombe, ça fait 4 p'tits moutons... 4 p'tits moutons qui couraient (etc.) ». Les enfants chantonnent la mélodie, ne comprennent pas les paroles mais tentent de dire la fin des mots. Ce qui donne « Ton ! Eige ! Manège ! Ton ! ». Les mères présentes nous regardent avec tendresse.

L'après-midi, je rencontre les membres du Bureau de la maison des jeunes. J'avais demandé à Allassane, un employé du campement et coordonnateur jeunesse, d'organiser ce temps d'échange autour de la spiruline. C'est un exercice différent que la présentation au lycée de Sabou car mon intervention ne se faisait qu'à l'interclasse et les jeunes n'avaient jamais entendu parlé de la spiruline. Aujourd'hui, j'ai le temps et les personnes présentes sont déjà un peu sensibilisées. Je peux m'autoriser à poser un cadre contextuel. A mon sens, on ne peut vraiment saisir l'utilité de la spiruline que si on aborde en amont ce qu'est la nutrition et la malnutrition.

Nous nous mettons en cercle. Je demande à casser un peu le protocole car Allassane avait préparé une table avec une chaise en estrade. Je mets de suite tout le monde à l'aise. Je me positionne en leur disant que j'aimerais que ce soit interactif et que « je n'ai pas le savoir absolu » ! C'est donc devant cette petite assemblée que je commence mon exposé.

Je pose des principes de base qui sont intérressants d'être rappelés. J'essaie d'être simple dans mes propos. La nutrition, c'est ce qu'on mange pour vivre. Tout bêtement. En France, c'est un plaisir. Ici, c'est une nécessité pour survivre. J'utilise des images pour parler des proteines (briques), des lipides (camion) et des glucides (carburant). Ca a l'air de leur parler. Je leur dis que les proteines construisent, réparent et défendent le corps. Les lipides sont un moyen de transporter l'énergie et les glucides sont utilisés par les organes, le cerveau et les muscles. L'image de la maison semble bien appréhendée. Alimentation équilibrée = maison solide. Alimentation déséquilibrée = maison dégradée. Je glisse les vitamines et minéraux dans les schémas. Tous reconnaissent qu'ils cultivent des fruits et des légumes (porteur de vitamines) mais qu'ils en consomment peu et les revendent au marché pour acheter des céréales (mil, sorgho essentiellement).

Cela m'amène à la malnutrition, qui est une conséquence des proportions de proteines/glucides/lipides mal repectées. La maladie qui ne fait plus ressentir l'envie de manger, la pauvreté qui ne permet pas d'acheter les aliments et les mœurs (remplir son grenier à mil après chaque saison des pluies) sont autant de causes à la malnutrition en Afrique. « Une maison dégradée », ça donne une mauvaise santé, un corps qui ne fonctionne plus normalement, de la fatigue, des douleurs, moins de défences face aux maladies, un mauvais développement chez l'enfant, des avortements ou accouchements compliqués pour les femmes, la déprime, etc. etc. etc.

La spiruline peut être une réponse pour lutter contre la malnutrition. Au même titre que la diversification alimentaire (manger d'autres céréales comme le riz ou le blé). J'insiste bien sur le fait que la spiruline n'est pas un médicament mais un complément alimentaire. Elle permet d'être maintenu en bonne santé ou de faire face aux maladies (et donc d'éviter de payer des soins). On se situe vraiment dans le champ de la prévention. Je leur explique que la spiruline est une algue verte, qui pousse depuis la nuit des temps en milieu naturel (exemple : Lac au Tchad). Elle préfère toutefois les pays à climat chaud. Dans les fermes de spiruline, on va reconstituer son milieu de vie à l'aide de produits et d'agitateur. Je leur donne des recommandations pour utiliser le produit :

  • surtout ne pas le faire cuire car il perdrait toutes ses propriétés

  • bien fermer le sachet une fois ouvert pour éviter que les insectes n'entrent

  • et le conserver dans un endroit ni trop chaud, ni trop humide.

Je leur donne un ordre d'idée pour les quantitiés en fonction du public ciblé et la durée des cures.

A l'issue de la présentation, j'ai plusieurs questions que je trouve très pertinentes. Ils sont déjà en train de réfléchir de quelle manière ils pourraient l'aborder avec la population de Sabou. Ils parlent de sketchs, de pièces de théâtre. Je les laisse parler entre eux. Je me réjouis de l'interêt qu'ils ont pour la spiruline et la malnutrition en général. Django, le secrétaire de la maison des jeunes, déplore le manque d'outils de communication. Je m'engage à lui faire parvenir des planches illustrées rapidement pour que leur équipe se l'approprie. Je m'en occuperai à mon retour en France et je ferai passer tout ceci par l'intermédiaire de la prochaine mission.
Django voudrait avoir dans l'avenir d'autres apports théoriques. J'en parlerai à Albert. J'insiste vraiment sur l' « approche santé communautaire ». J'explique en fin de séance sous le coup de l'humour que mettre des affiches de spiruline sans accompagner le message ou faire venir une « na sara » une fois de temps en temps ne marche pas ! Il faut que les personnes qui ont eu des cicatrisations et des rétablissements plus rapides grace à la spiruline s'expriment. Il faut que ceux qui véhiculent la promotion la goutent. Il faut être convaincus pour convaincre !

La journée se finit à Koudougou (20 km de Sabou) pour avoir une connexion internet (qui ne marchera pas en fin de compte). Gilbert et Allassane nous amènent avec les bretonnes en moto. Nous sommes cinq. Il y a deux motos. Je vous laisse imaginer...

Découverte du jour : Sur le trajet de Koudougou, Gilbert me montre des tas de granits sur le bas côté de la route. Il m'explique que ce sont les femmes qui les concassent à la main. Des entreprises de travaux publics viennent ensuite les récupérer pour refaire des routes.

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